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samedi 30 novembre 2019

Je te l'offre

Je te l'offre




La dune des abers où déambule le silène, je te l'offre

Le sentier d'hiver où papillonne le silence, je te l'offre


La plage agraire où se prélasse la sirène, je te l'offre


Les Mots tout vert où se niche le signe, je te l'offre


Le bois du cerf où badine la sibylline, je te l'offre


Le pré amer où ruisselle le cidre, je te l'offre


Le pont de fer où traîne le signal, je te l'offre


Le lit de vers où végète la symbiose, je te l'offre


Le salon sous verre où s'échappe la symphonie, je te l'offre


Le mas de pierre où Léo a clamé son singe, je te l'offre



Je te les l'offre. je t'offre tout ça et tout ce qui n'est pas

jeudi 28 novembre 2019

Clownesque




Clownesque



  
Clown, on dit que turlututu tu dandines doux comme un dindon ?
Glouglou, glouglou. Les bouffons gloutons gloussent ton nom
Et les Ducs ululent de burlesques intrigues. Houhou, où es-tu ?
Sinon à brailler ridicule des rimes mises en roue. Qui l’eut crû ?

Clown, on dit que laridène larido, dos au mur tu mûris une fresque ?
Croâ, croâ, croâ ?  Les sinistres noirs sieurs se plaisent grotesque
A piauler « Au fou » pour piétiner ton dessein. Keut keut, que fais-tu ?
A part teinter en tintamarre joyeux le joyau. Mais qui l’eut crû ?

Clown je suis, mais pas tagada tsoin tsoin selon les sournoiseries.
Ha ha ha, hi hi hi! Laissez dire que le clown est mort à la causerie.
Soit ! Qu’ils jappent en jurons et qu’ils applaudissent sans malice
Un tendre cœur a ouvert des lumières à anéantir ces hantises

Mais vraiment, qui l’eut crû ? Digue dingue dong dong

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"La bio ou le bio ?" Ou comment la nature humaine voudrait réduire les écarts

A la demande de l'association "Les amis de Jaurès" présente à Crozon, David Derrien a accepté d'intervenir sur les modèles économiques qui régissent  l'ensemble des acteurs des filières de l'agriculture biologique.  

Deux tendances fortes se dégagent entre un modèle basé sur des valeurs philosophiques et un autre sur une logique capitalistique.  

Si David Derrien se focalise sur le bien fondé d'une agriculture biologique à deux vitesses, il s'interroge tout de même sur  la tentation de "La bio" de déroger aux engagements historiques. 

David Derrien, maraîcher sous certification "Nature et Progrès" (2016-2018)  puis "Certipaq bio" en 2019.

Durée : 1H
Image : Penn ar web (extrait de la soirée-débat de décembre 2018)
Contacts pour les conditions : 
derrien.david29@gmail.com / 06 71 88 76 14



L’image contient peut-être : Denis Didier Labeillaud, sourit, arbre, chapeau, plein air et gros plan

Les vicissitudes d'une abeille sauvage suite IV


suite II

suite III

https://www.youtube.com/watch?v=ayF_hnb1iUE

« Allo ! Didier, Oui, c’est moi, Claudine. Ca va ? Dis-moi, est-ce que je peux inviter Bénédicte à venir au rassemblement de demain ? Oui ? Super !... C’est qui ? C’est la propriétaire de la maison au bout de la grève de Saint Jean. Tu vois où elle est ?... Non ? En fait, comme sa maison est en contrebas du champ des serristes, Bénédicte est bien embêtée… Non, non, elle ne vît pas là. C’est une maison secondaire… Elle est venue passer quelques jours avec une de ses filles. Oui ?... On fera un détour là-bas ? Ok… D’accord… Je préviens Bénédicte. A demain alors… ».
Didier avait sympathisé avec Claudine après le rendez-vous mouvementé du mois de novembre. En plus d’être de la même génération que sa mère, Claudine, proche du communisme, comme sa mère, avait fréquenté dans les années 60 à Roscoff, une bulle politico-artistique, animée par le célèbre navigateur Yvon Le Corre. Ce même Yvon Le Corre, qui dessina un magnifique portrait de la mère de Didier, faisait régulièrement escale à Santec, un fief communiste du Haut-Léon. Quelque peu farouche, la santécoise avait fini par décliner la proposition, d’un « coureur de femmes », de l’accompagner dans ses périples transatlantiques. Bien plus tard, Claudine, dans un âge plus avancé, à son retour sur Plougastel-Daoulas, avait tenu la dragée haute à cette famille de serristes. Presque seule, elle avait réussi à bloquer, pendant plusieurs décennies, le projet d’extension que l’on voyait maintenant. Didier se félicitait d’être entouré de femmes aussi déterminées que Claudine et Mme « Electrolux », celle de Beauvoir (appelée ainsi à cause du nombre incalculable d’aspirateurs qu’elle vendit tout au long de sa carrière de commerciale). Avec d’autres, ils étaient parvenus à constituer un collectif de riverains, mécontents des débordements de certains serristes, collectif qui deviendrait ensuite l’association « A quoi ça serre ». Didier, désigné comme l’ennemi public n°1 des « Seigneurs » de la commune, ragaillardi par cette première vague d’adhésion, multiplia les initiatives et les repérages sur le terrain. Une association, mieux armée et plus installée comme « Eau et rivières de Bretagne », acceptait d’accompagner « A quoi ça serre » dans ses débuts. Il fut donc décidé d’organiser une tournée sur la presqu’île afin de faire un état des lieux. Après s’être mis d’accord avec le coordonnateur d’Eau et rivières de Bretagne, et un représentant d’AE2D (Agir pour l’environnement et le développement durables), plusieurs personnes se retrouvèrent un samedi matin de mars 2013, près de la chapelle Saint Adrien pour démarrer le circuit. La presse locale était présente. Bénédicte aussi, comme prévu, accompagnée de sa fille et de Claudine.
Avec Eau et rivières de Bretagne
Ouest-France, 04 mars 2013. Extraits.
Le collectif « A quoi ça serre » s’est réuni samedi à Saint Adrien. Didier D. avait invité les riverains et deux associations environnementales à faire le tour de ce secteur qui selon lui « peut poser problème en raison de sa proximité avec des serres ».
Didier, tout absorbé par son discours devant une quinzaine de personnes, avait bien noté la présence de Bénédicte. Elle s’était placée au centre du groupe, face à lui. Evidemment, Claudine, n’avait pas précisé à Didier, combien Bénédicte était jolie. Une ravissante métisse, avec une authentique touche asiatique qui sautait aux yeux. A tour de rôle, les représentants des associations prenaient ensuite la parole pour expliquer les enjeux.
Des actions pourraient être menées suite aux observations. Le collectif a déjà prévu de réaliser un prélèvement d’eau à Kervezingar.
Il était temps de poser pour la photo. Bénédicte, toujours au centre du groupe, souriait délibérément. Seul, le froncement du sourire venait crisper un visage radieux, un sourire qui découvrait une rangée de petites dents, méticuleusement blanches, et faisait remonter les pommettes, exagérant la légère rondeur de son visage, plissant plus encore le contour de ses yeux ombrageux. De charmantes oreilles étaient en partie dévoilées sous une longue chevelure, d’un brun qui protégeait une féminité discrète. La simplicité qu’elle affichait, autant par son attitude que par sa tenue vestimentaire, la rendait extrêmement séduisante. Enfin c’est ce que pensait Didier. Il le pensait mais il ne voulait pas que cela se ressente. Alors pour ne pas apparaître emprunt de goujateries, il communiquait avec elle à travers les quelques mots échangés avec sa fille. La marche se prêtait à merveille à cet exercice d’approche, feint d’indifférence. Inutile d’en faire de trop. Quelques questions impersonnelles suffiraient à camoufler sa véritable distraction. Sur le parcours, qui les emmenait dans les villages de Kerzivez puis de Kervezinguar, Bénédicte n’en était pas moins restée silencieuse. Parmi les banalités d’usage elle avait assorti son propos par un : « Je suis très admirative de ce que vous faites. Il en faut des gens comme vous ». Merde ! La tentative de Didier de se maintenir dans une neutralité masquée s’effritait dans ses remerciements qui voilaient à peine son trouble. Déjà touché par une telle flatterie, Didier se persuada que le ton exagéré de son annonce accentuait la sincérité qui s’en dégageait. « Je n’ai fait que rassembler des personnes autour de ce problème », avança-t-il, tentant vainement de se sortir du silence occasionné par cette déclaration. Finalement, c’est le départ en voiture, vers le manoir du Cosquer de Mme « Electrolux », qui mit un terme à l’embarras de Didier. Comme le trajet, il fut de courte durée. Au beau milieu du domaine de 8 ha de bois, Didier ne put s’empêcher d’essayer d’attirer l’attention de Bénédicte : « Attendez, vous avez une araignée dans les cheveux – Où ça ? Là ? – Non plus haut, sur la droite… Voilà – Je ne la sens pas… Elle est partie ? ». Didier, amusé, finit par lui avouer sa blague qui fit beaucoup sourire Bénédicte. Il ne lui avait pas tout dit. Ce n’était pas approprié de lui faire savoir combien il avait accompagné des yeux cette main qui passait dans les cheveux, une main qu’il aurait voulu être la sienne. La propriétaire du manoir ne tarissait pas de superlatif pour parler du remblai de plusieurs milliers de m2, élevé en lieu et place de prairies pour y construire une serre industrielle qui faisait face à son manoir, « Une horreur », « C’est une honte ». On creusa, à la va vite une sorte de cuvette artificielle. Ce bassin de rétention avait pour objectif de récupérer toutes les eaux pluviales provenant des toitures des serres. Hors, sous dimensionné, le bassin dégueulait ses eaux vers l’inclinaison du terrain, des eaux, qui se chargeant de terres, parvenaient dans le lavoir du domaine logé à l’ombre des arbres, continuaient leurs courses dans des sillons creusés par leurs passages répétés dans le champ situé entre le bois et la rive de l’Elorn, là où se nichait la maison de Bénédicte. Après avoir entendu la plainte de Mme « Electrolux », la troupe descendît à travers le bois. Effectivement, l’eau avait pris ses habitudes dans des ravines assez profondes, se souciant guère des obstacles, et au besoin les contournait, si toutefois ils n’étaient pas avalés. L’eau léchait les sédiments qu’elle jetait sans retenue dans l’Elorn, donnant un aspect jaunâtre à sa surface. La rivière qui séparait les communes de Plougastel-Daoulas et de Loperhet n’échappait pas au lessivage argileux.

Aucune description de photo disponible.

Ce qui inquiétait Bénédicte, c’est que la rivière gonflait et pouvait inonder la maison à partir du pignon où elle dévalait. Par le haut, la maison, d’allure robuste avec son toit en zinc, faisait dos à la parcelle. L’accès par l’arrière débutait par une passerelle de fortune qui enjambait la rivière. Le passage se faisait ensuite entre le mur émergé et la parcelle de bois sur la droite. Puis on la contournait par la gauche. Le tracé d’un chemin venant de droite, s’échouait entre le mur de façade parsemé de volets bleus et une plateforme enherbé, sans doute construite pour un usage professionnel. Plus loin débutait la grève que l’on empruntait afin de rejoindre la chapelle de Saint Jean et la maison de Claudine tout proche. Bénédicte jouait l’hôtesse d’accueil. A l’intérieur, dans la semi-obscurité, on devinait quelques mobiliers de vacances. Le feu du poêle réchauffait une atmosphère poisse que même l’odeur florale des bougies n’arrivait pas à masquer. L’humidité marquait les grands carreaux du sol. Elle suintait les traces laissées par les bottes, prises au piège de la boue apportée là. La lumière du mois de Mars ne parvenait pas à s’incruster dans les recoins sombres de la pièce du bas. On apercevait tout de même, dans la clarté de la fenêtre du pignon ouest, un escalier grossièrement agrippé à l'étage. Bénédicte expliqua dans l’entre fait un peu l’historique de cette maison. Au sud le mur était enfoncé de moitié dans la terre. Son épaisseur garantissait une certaine réserve de chaleur pendant les beaux jours. Sauf que l’exposition des fenêtres de la façade au nord, se limitait à pourvoir l’intérieur de la maison d’une luminosité parcimonieuse, fréquemment capricieuse quand le ciel coiffait le pays de sa toison grise. D’après les réflexions de Didier, ce n’est pas tant l’absence de lumière qui desservait la maison mais bien l’inoccupation quasi permanente des lieux. L’humidité envahissait sans vergogne l’espace, jusqu’à creuser le bois des poutres. Pas facile tout de même, d’y vivre toute l’année s’il n’y avait pas l’électricité (le dernier poteau était planté à 500 m), l’eau courante (c’est une cuve qui récupérait l’eau de pluie) et de chauffage (à part de temps à autre, durant un séjour hivernal, une flambée dans le poêle). A vrai dire, cette bâtisse n’avait rien à l’origine d’un lieu d’habitation. Si on avait construit un remblai face à la maison, c’était pour les besoins d’une activité professionnelle, aujourd’hui disparue, la conchyliculture. Plusieurs bassins, congestionnés soit en contre bas, dans la vasière de l’estran ou à l’aplomb d’arbres noyés sous leurs feuilles, près de la plateforme, figeaient ce passé quelque peu revisité par les explications de Bénédicte. Le rez-de-chaussée de la construction avait eu pour fonction, en attente d’expédition, d’entasser les sacs de moules, préalablement cajolés dans les différents bassins de décantation. L’étage se justifiait, quant à lui, pour les besoins administratifs et de comptabilité. Après que le gérant est jeté l’éponge, faute de succession, les quelques acquéreurs qui suivirent avaient tenté de rendre ce lieu confortable, ou tout au moins habitable, avec l’agencement d’un mobilier de cuisine présentant les signes d’une agonie proche, due à l’agressivité continue d’une moiteur souveraine. A quelques reprises, dans l’intervalle d’une mise en vente, et du fait de son emplacement très isolé, voire inaccessible par la rive pendant la marée haute, la maison avait été squattée. Elle n’en portait à priori pas trop les stigmates, tels que des graffitis ou de profondes marques de détérioration.
On ne s’éternisa pas trop chez Bénédicte. Comme si ce n’était pas le bon moment, comme si ce n’était pas vraiment le sujet. Pourtant, le cadre aux alentours donnait envie de flâner encore un peu ou de s’attarder dans les paroles et les gestes de Bénédicte, qui ne manquait pas d’empathie, aux yeux de Didier, durant tout le temps de son passage au lieu-dit les dépendances. La visite s’achevait par des salutations réciproques, les vœux d’une bonne fin de séjour et la promesse de Bénédicte d’adhérer à l’association « A quoi ça serre », dès son retour en Bourgogne. Le regard de Didier se perdait maintenant sur L’Elorn, même s’il butait sur la rive d’en face. Il n’a pas du se retourner une fois, perdu qu’il était dans ses pensées. Le retour au manoir se fit à l’arrière du groupe. On avait décidé de faire le point chez Mme « Electrolux », autour d’un apéritif, et de se donner quelques orientations avant la prochaine rencontre. Peut-être aurait-il du se retourner une dernière fois. Faire appel à son intuition féminine qui l’aurait encouragé à la prudence. Mais rien, strictement rien, n’éveilla la moindre dissonance. Comment d’ailleurs pouvait-il penser, à cet instant précis, après la plus redoutable des connivences,  après un premier contact, singulièrement amical, et donc anodin, que Bénédicte avait flashé sur lui ? Comment pouvait-il même concevoir que cette maison deviendrait un piège et que c’est Bénédicte qui l’y attirerait 

« Dès la première nuit, après notre rencontre, j’ai fait un rêve érotique ».

mardi 26 novembre 2019

Des urgentistes en panne de voix, à Plougastel

A Plougastel-Daoulas, les élections municipales de l'an prochain seront-elles marquées par l'absence de ceux et celles qui ont une vision juste des urgences qui accablent de plus en plus de personnes, de plus en plus l'environnement ? Au regard des protagonistes annoncés, je crains fort que nous puissions faire, encore une fois, le deuil d'un véritable changement de paradigme local. Parce que, contrairement aux idées reçues, la "déconstruction" nécessaire à la "construction" ne viendra pas d'en haut et des élites mais bien d'une modification en profondeur de notre mode de vie local; l'exemple ne viendra pas d'en haut, mais il naîtra du bas.
Quel est-il d'ailleurs ce mode de vie ? Il combine à la fois le déplacement, l'énergie, le logement, le loisir, l'économie, la citoyenneté, l'environnement, la scolarité, la solidarité et l'entraide, l'aménagement du territoire, l'urbanisme, l'alimentation, et peut-être ce qu'il y a à regarder en premier et de plus difficile, notre propre capacité de résilience.
Pour répondre aux besoins de "déconstruction" et d'agir dans l'urgence, ce n'est pas de moyens dont nous avons besoin mais bien plus de volonté, pour ne pas dire de courage politique. Les programmes, qui seront imprimés par les uns et les autres, resteront sans effets parce que édulcorés par la nécessité d'être populaires afin de convaincre le plus grand nombre de leur capacité à ne pas modifier les grandes lignes de la gestion municipale. Sauf qu'il est impératif de se rendre impopulaire pour de bonnes raisons, qu'elles soient d'ordre sociale ou environnementale. L'accueil des migrants est une nécessité d'intérêt général. Tout comme l’aménagement d'un territoire est d'intérêt général en cessant de construire dans la presqu'île (loi littoral, cohabitation riverains/industriels, circulation,...). Obliger des propriétaires à entretenir les friches est d'intérêt général, et devra passer par la contrainte si nécessaire, afin d'amoindrir la prolifération de sangliers par exemple, etc, etc, ... 
Heureusement il reste des mesures de salubrité publique à concevoir comme l'autonomie alimentaire, énergétique et d'assainissement. Plougastel-Daoulas possède une ressource dont elle ne fait rien ou si peu, sa terre, une terre destinée à une agriculture paysanne et diversifiée afin d'alimenter des îlots de consomm'actions ou pour approvisionner les écoles. Plougastel-Daoulas possède suffisamment de ressource en surfaces couvertes (bâtiments sportifs par exemple) pour installer des panneaux photovoltaïques. Plougastel-Daoulas possède suffisamment de ressources foncières pour expérimenter la phyto-épuration ou le lagunage dans les villages. 
Toute cette panoplie de mesures d'urgence, est une panoplie de bon sens. Donc l'urgence invite au bon sens et à la sobriété. Alors qui incarne le mieux l'urgence sociale à Plougastel-Daoulas ? Je salue l'initiative d'André Le Gac, ancien maire de la commune, de tenter de donner du sens à l'action sociale et d'alerter sur sa déperdition comme il le fait quand on le voit aux côtés des Gilets Jaunes, et je ne pense pas être le plus mal placé pour parler d'urgence environnementale. J'incite André Le Gac a prolonger son engagement pour regrouper autour de son appel un maximum de personnes désireuses de représenter cette urgence sociale. Je m'associe à cette démarche en tant qu'urgentiste environnemental. Et si la question de la tête de liste se posait, elle serait subsidiaire car un nouveau modèle de gouvernance est à instaurer (tirage au sort de la tête de liste, représentation communale tournante accessible à l'ensemble des éluEs,  création d'assemblée de quartiers,...). 
J'appelle de mes voeux à ce que l'urgence sociale et l'urgence environnementale se combinent et ne parlent plus que d'une seule voix, celle qu'il ne faut plus dévoyer. A défaut c'est toute notre société qui sera en panne. 


dimanche 24 novembre 2019

A mon ami, Pêr Folgalvez

Le premier mot qui me vient à l'esprit pour définir, mon ami Pierre Folgalvez, décédé depuis plus de 10 ans, dans le courant humide d'un mois de novembre comme celui-là, est le mot : probité. Non pas parce que Pierre, après des siècles de combats contre l'oppresseur fasciste et pour la justice des Peuples, observait à la lettre le respect de règles très conformistes, trop "centralisées", mais bien parce qu'il tentait d'en démonter le mécanisme diabolique par une moralité politique d'une rareté exceptionnelle. Mais être doté d'une moralité exceptionnelle ne fait pas de vous un être doté de suffrage. Au contraire, comme il l'écrivait à juste titre en 2005 sur le conformisme établi à propos d'une affaire qui nous intéressait à l'époque : ".... Sans doute Derrien (ndlr : moi :) !) n'avait pas compris que seule est valable la thèse des "leaders" (ndlr : à l'Union démocratique bretonne), bien qu'elle ne soit pas forcément explicitée." Et à force de taper sur les "leaders", ils vous condamnent à l'arbitraire et finissent par vous traiter d'hérétique !


Pourquoi d'ailleurs me rappeler aujourd'hui aux bons souvenirs de cette amitié inoxydable, née dans les confins des années 90, dans l'inconfort d'une terre léonarde, déchirée par le productivisme agricole ? Peut-être est-ce le moment pour moi de renouer avec une certaine chaleur humaine. Peut-être aussi que mes visites, chez Pierre, près de la Penzé, îlot préservé au sein d'ornières labourées, me ramène à mon propre isolement politique actuel face à de nouveaux "leaders" locaux, qui s'émeuvent tout d'un coup, sur l'état de santé de la Planète, alors que ceux sont, ceux-là mêmes, qui ont laissé propager l'épidémie socialo-communiste ? Ces charlatans qui prodiguaient des bons soins à l'économie libérale en nous faisant avaler un élixir social frauduleux. Ayant asséché leur zone de confort, ils se trouvent de nouvelles vertus (en voilà), dans la "transition écologique".

En plus d'être munis d'une amitié durable et sans failles, nous avions en commun avec Pierre, le fait de déplorer, inlassablement, les alliances fortuites ou opportunistes de l'UDB avec les socialistes de Bretagne. Il va s'en dire que nous n'étions pas nombreux à l'UDB à regretter la collusion des "leaders" de cette période. Pierre serait content aujourd'hui de se rendre compte que l'histoire politique nous donnait déjà raison face aux "leaders" du mouvement. Pour ma part je me sens orphelin de sa présence quand je suis de nouveau réduit à affronter des "leaders", cette fois-ci "écologiquement improvisés".

Je pense que, à travers de nombreux entretiens en tête à tête, étant de mon côté un jeunot qui découvrait l'existence de la supercherie "France", Pierre m'a insufflé une part de lui-même, une part de philosophie politique, une part de l'histoire de Bretagne. Je ne l'ai jamais regardé comme un père que je n'ai pas eu. Encore moi comme un "guide politique". Je crois même que ça ne lui aurait pas plu. J'aimais tout simplement écouter les pages d'Histoire dont il avait été l'acteur. J'avais une infime reconnaissance pour cet homme qui avait fait la grande Histoire des hommes d'exception, que ce soit du côté de Morlaix, Paris, d'Alger ou Barcelone.

Il n'a jamais renoncé à remettre en question son engagement politique, et celui des autres, parce que la morale le lui demandait, comme en témoignent les extraits d'un de ses courriers que je vous livre ainsi :
"Je suis, moi, plutôt fier d'avoir contribué à créer, avec Prenant par exemple et quelques autres, la première "Opposition communiste" qui en 1956 dénonçait le stalinisme."
"N'est-il pas vrai aussi que des militants bretons pensent être meilleurs que les Bretons qui ne militent pas, ceux-là sont, tout à la fois, prétentieux, sectaires et imbéciles. Je préfère quant à moi, "la preuve" que j'administre pour fonder l'existence du peuple breton : C'est qu'il y a en son sein le même pourcentage de cons qu'ailleurs. Pas plus, pas moins !". (Si seulement il pouvait constater dans quelle abîme de médiocrité nous sommes tombés !).
"J'ai développé à l'UDB, depuis de longues années, l'idée que le centralisme démocratique s'est mué dans le parti en une démocratie centralisée. Ce qui ne me semble ni différent ni "intelligent." 

L'âge a commandé à Pierre de partir dans une année quelconque pour un homme qui ne l'était pas. C'est bien surement la seule fois où il aura dû abdiquer !
Ne m'en veux pas Pierre; je ne t'ai pas oublié mais déjà que c'est difficile de vivre avec les vivants, alors tu penses bien qu'avec les morts....


"D'am mignon Pierre Folgalvez, mab Yvonne, ar rezistant, ar c'homunour, an tisavour, an aljeriad, ar barselonad, ar breizhad, ar gwaz hag o zad, hag ar rezistant c'hoazh. Pep tra hag unan war un dro.
Tremenet eo d'an 11 a viz Du, devezh ma vez ar c'horfoù hag an anaon o tiboaniañ.

A mon ami Pierre Folgalvez, le fils d'Yvonne, le résistant, le communiste, l'architecte, l'algérien, le barcelonais, le breton, l'époux et leur père, et puis encore le résistant. Le tout et l'unique à la fois. 
Décédé le 11 novembre, jour de délivrance pour les corps et les âmes en souffrance.

David Derrien, éditeur. Le livre "1977-2007. Diwan, hiziv"

jeudi 21 novembre 2019

Les vicissitudes d'une abeille sauvage, suite III


suite II
L’engouement populaire local autour de l’Abeillaud cessa net lorsque Didier décida de faire savoir publiquement qu’il s’opposait au choix du site du centre de formation et d’entraînement du stade brestois sur Plougastel-Daoulas. Il est bien connu que l’on ne badine pas avec l’essor économique surtout s’il est porté par le football. Rien ne peut stopper le ballon rond, et surtout pas des emmerdeurs d’écolo. En lieu et place d’une trame verte, inscrite au Plan d’Occupation des Sols, le maire, soutenu par des industriels de la région brestoise, déposèrent leur dévolu sur un secteur couvrant 10 ha, qui, à leurs yeux, apparaissait attractif du fait d’une friche abondante et de quelques chemins abandonnés de la pratique de la marche, du fait d’inondations répétées provenant des écoulements des eaux de pluie du bourg. Démontrant au passage l’absence de scrupules pour bafouer des règles environnementales et d’urbanismes, ces protagonistes tout puissants, ne se souciaient guère de la découverte d’espèces protégées, dont le fameux escargot de Quimper. Le maire ne se contenta pas de se retrouver hors-la-loi. Il mouilla le maillot pour convaincre les différents propriétaires de céder leurs parcelles. A 10 euro le m2, il y avait de quoi se frotter les mains. Pas un ne refusa une proposition aussi alléchante. Emmenés par tant de certitudes, certains propriétaires, poussés par la cupidité, n’attendirent pas la fin des procédures de permission de construire le centre de formation pour abattre des arbres de plus de 50 ans, eux aussi protégés par le Code rural. « Mais qu’est ce qu’on en a foutre des Codes et des Règlements puisque Monsieur le maire est sur de son fait ! ». Ce dernier, gonflé par l’orgueil, ne devait pas tarir d’éloge devant une telle opportunité, une aussi belle opportunité pour sa commune ! Au point où les meilleurs éléments du club local pouvaient être sélectionnés pour rejoindre l’élite brestoise. On avait le droit d’y croire. Beaucoup y croyaient, à l’élite, aux emplois, à la force de frappe des métiers du bâtiment. On pouvait même entendre que c’était vital pour le département du Finistère, sinon, certains pronostiquaient qu’on se précipitait vers une nuée de dépôts de bilan, c’était même la fin du bâtiment dans le département. Didier le répétait à qui voulait l’entendre, si peu nombreux, qu’il ne s’opposait pas à la construction du centre de formation, mais bien au choix du site d’implantation. Dès lors qu’on découvrit l’escargot de Quimper, rendant plus aléatoires les ultimes décisions administratives, des supporters du stade brestois se déchaînèrent contre quelques écologistes, dont l’Abeillaud. Pris pour cible, menacé à plusieurs reprises, Didier décida de porter plainte contre X. Il fit connaître sa décision par voie de presse. La vindicte populaire se gonfla d’autant contre lui que Didier était le seul à s’exprimer sur le sujet, de l’aveu même d’un journaliste. La pression populaire s’exerça sur certains écologistes, au point qu’ils préféreront déguerpir tout un week-end afin de se terrer dans des contrées moins hostiles. Nullement affecté par cet environnement inhospitalier, Didier, lui, continuait à se comporter comme à ses habitudes. « Tu es encore en vie ? » avait-il entendu une fois dans la rue. Un peu étonné de voir les autres s’inquiétaient pour son sort, Didier ne se formalisait pas. Il leur laissait, volontiers, cette inquiétude. L’insouciance qu’il affichait n’était pas comprise de tous, à voir cet échange malheureux avec un autre, accusé d’hérésie : « Ecoute, prends-le comme un divertissement ! – Comment ça comme un divertissement ? Mais c’est grave quand même ! » S’était-il emporté. Oui grave mais pas mortel. De toutes les façons, d’après le plus grand nombre, la messe était dite, le centre allait être construit. A voir le rassemblement de plus de 200 supporters à quelques encablures du futur projet, écoutant à tour de rôle le président du club de football de Brest et le maire de Plougastel, et à les entendre juchés sur une remorque agricole, rien ni personnes, et encore moins des « intégristes d’écolo » (dixit M. le maire) ne pourraient entraver la bonne conduite de la construction de la future structure sportive, pourvoyeuse de prochains champions. Mais au coup de sifflet final, quel carton rouge ! Voyant la situation administrative lui échapper le président tenta, dans les arrêts de jeu, de revoir ses exigences à la baisse. Il n’était plus question que du centre de formation. L’entraînement des jeunes se feraient ailleurs. Ils ne lorgnaient dorénavant que sur 5 ha de terres agricoles. Didier annonça, puisque la presse le lui demandait, qu’il n’allait pas se battre, seul, pour 5 ha de champ de maïs, malgré tout engloutis sous une infrastructure nouvelle. L’épilogue administratif donna finalement gain de cause aux associations de protection de l’environnement. Le Tribunal compétent retoqua le permis de construire déposé par le Stade Brestois, au grand dam des élus locaux, d’ailleurs plus affectés que les investisseurs qui avouèrent, quelques mois plus tard, lors d’une annonce faite par la voix du nouveau président du club, qu’ils n’auraient pas pu réunir les sommes nécessaires à l’édifice d’un tel projet.
Cet épisode, qui exacerba les tensions entre les défenseurs de l’application des règles en matière d’environnement et des irresponsables, aveuglés par le sectarisme de la croissance à tout prix, couplé en cela par le fanatisme le plus abject et le plus dérisoire, démontra que sous le costume de l’abeillaud, il y avait un homme. Un homme avec des engagements qui ne se limitaient pas à la préservation de la biodiversité. De façon peut-être inattendue, on découvrit que l’Abeillaud ne se contentait pas d’être un trublion de service, un hurluberlu sympathique qui impressionnait les enfants avec son kazoo. Il y avait là une question de cohérence : comment se prétendre défenseur de l’environnement, et s’opposer par exemple à l’aéroport de NDDL, s’il fermait les yeux, da façon complaisante, sur les atteintes, à cet environnement, qui se déroulaient sur sa propre commune ? Il ne suffisait pas d’arborer l’autocollant de NDDL pour se prétendre défendre une cause qui dépassait le seul cadre du bocage nantais. Il faut bien se l’avouer, se mobiliser à plus de 3 heures de route de Plougastel-Daoulas est bien moins contraignant que de se frotter à quelques dépositaires de l’ordre seigneurial qui appliquent des règles qui leur sont propres : l’intimidation et les menaces. Pour les tous autres, les rideaux restent tirés et les chaussons font office de refuge même pour de vertueux acariâtres qui se planquent dans leur maison de pailles. Ce qui à contrario, n’empêcha pas Didier de se faire allumer par ceux-là mêmes qui se satisfaisaient de se complaire dans la lâcheté : « Vous vous rendez de ce que vous avez fait ? Il y avait des emplois en jeu ! », « C’est toi dédé l’Abeillaud ? T’es qu’un con, on va te péter la gueule ! ». « Tiens d’ailleurs, je suis sure que c’est vous qui avez emmené l’escargot de Quimper sur place ! ». La renommée de Didier s’était donc désagrégée, à l’image du plastique noir abandonné sur les talus et dans les friches de la presqu’île suite à la culture volumineuse de fraises. Ce qu’il ne savait pas encore, c’est qu’il n’en était qu’au début de son impopularité. Surtout, il ne se doutait pas que c’était sa popularité qu’il entrainerait vers une rencontre irréversible.

Que se passait-t-il à Plougastel-Daoulas ? La délivrance de permis de construire par la mairie semblait décidément se faire de façon partielle et partiale. En tout cas, leur conséquence suscitait des situations de blocage, favorisant l'éclosion de tensions inacceptables. La situation qui suit, ne s'apparenterait pas à de la littérature sublimée par Simone de Beauvoir mais pourrait faire l'objet d'un récit loufoque avec de nombreux rebondissements, les circonstances paraissant tellement improbables.
Au lieu-dit Beauvoir à Plougastel-Daoulas, on ne trouve pas de Simone mais une autre femme avec une certaine trempe. Cette dernière est excédée, à bout de patience et remontée par son voisin expansionniste. Serriste industriel produisant une culture intensive de tomates, ce cher nettoyeur, pour satisfaire ses besoins, toujours plus croissants, entreprend de décalaminer quelques hectares de terres agricoles, fond de vallée, parcelle boisée, pour favoriser l'extension des nouvelles serres. Celui-ci ne se contente pas de défoncer les chemins et de détourner les cours d'eau. Il entreprend dans le courant des années 90 de prévoir les fondations de son ouvrage en y entreposant tout ce dont la terre réclame pour se nourrir (exemple de bidons ayant contenu des produits chimiques, appelés nutritions végétales, utilisés pour les plants cultivés en hors-sol et sous serres). La présence de ces déchets ne peut-être qu’une vision partielle d’une pollution invisible et plus conséquente. L’érosion n’a pu qu’aggraver  le phénomène, en rejetant durant cette dernière décennie, les résidus chimiques de ce dépotoir vers l’Elorn toute proche. Alors qu'ils interviennent sur un feu de déchet sur la zone du Cosquer, un pompier prévient la propriétaire du manoir : "Et bien dis-donc c'est un  Tchernobyl que vous avez là !". Depuis la plaignante a réclamé le PV de l'intervention pour prendre connaissance du type de produits répertoriés. En vain....
15 ans après, des vidéos réalisées par l’association de protection de l’environnement, « A quoi ça serre », dont Didier en est à l’initiative, permettent d'apprécier l'ampleur de l'édifice : plus de  10 mètres de haut au point culminant. On se retrouverait presque face à un phénomène tellurique rappelant le déplacement des continents. Ayant entrepris ces travaux depuis belle lurette, le serriste ne se contente pas de défigurer la nature, il impose ses pratiques et ne respecte pas les procédures pour les permis de construire. Conformément aux déclarations d'ouverture de travaux, l’affichage des permis de construire doit être visible à partir de la voie publique. Or après examen sur le terrain par Didier, aucun panneau n’a été installé sur deux parcelles concernées (Le non-respect de l'obligation d'affichage d'un permis de construire est passible d'une sanction pénale entraînant une contravention). Les irrévérences sont trop nombreuses à relever, à savoir tout de même que ce remblai a été réalisé en l’absence d’études d’impact sur les zones humides. 
On dit le bonhomme hargneux, menaçant, qui terrorise des voisins, avec la gâchette facile (la société de chasse ne lui a pas renouvelé son permis : un comble !). Le maire actuel voudrait résumer cette affaire à une complexe querelle de voisinage, où deux propriétaires bien installés se battraient pour des peccadilles. Croire ceci serait inconcevable. Il s'agit en fait de laisser à d'autres les responsabilités qui lui incombent, ne pas ouvertement prendre partie et ménager la chèvre et le chou, se délester de conflits entretenus depuis trop longtemps, s'abstenir de ne pas utiliser son autorité d'élu; ce sont des éleveurs d'autruches que l’on devrait avoir à Plougastel-Daoulas. Enfin, c’était l’avis de Didier qui ne comptait pas en rester là. Le serriste, de son côté, non plus. Il commençait à épier de plus près les contributions écrites de l’écologiste, diffusées sur son blog. Alarmé par un communiqué de presse paru dans le Télégramme de la présence de Didier, appelant à un rassemblement sur la voie publique pour montrer l’étendu des dégâts, le pollueur préparait un comité d’accueil, un « contre rassemblement ». Car ce fut un véritable front hétéroclite qui attendait Didier au lieu-dit du Cosquer, rassemblement qui aurait du permettre, aux personnes présentes, de voir par eux-mêmes, l’extension disproportionnée et préjudiciable d’une serre. 
De gré ou de force, le personnel employé par les serristes incriminés s'était joint au comité d'accueil, hostile à toute condamnation des abus constatés, afin de faciliter l'extension de serres à Beauvoir. Il y avait dans ce groupe de soixante personnes (en face ils étaient cinq personnes, dont un couple de retraité qui s’étonnait surement d’être là), à la fois des serristes, le représentant de la société de chasses, la famille, des salarié(e)s d'origines étrangères ou pas. Ces derniers, selon Didier, ont été instrumentalisés pour considérer la propriétaire de Beauvoir comme une emmerdeuse et dédé l'Abeillaud comme un paria. La gifle, administrée par une tapette à mouches par le propriétaire des serres, ramena Didier à sa condition pitoyable d'insecte nuisible. « Toi, maintenant que je vois qui tu es, tu as intérêt à faire gaffe ! », s’époumona le vieux fusil à l’encontre de Didier. Ce qui frappe dans un premier temps c'est le parallèle à faire avec la manifestation de  ce même mois de novembre 2013, organisée par les bonnets rouges à Quimper pour contester les portiques de l’écotaxe : patron-salarié, pour certains, main dans la main. D'ailleurs une des salariés arborait fièrement un bonnet rouge avec une pancarte à leur attention "re zo re", « trop c’est trop », salariée qui ne se contenterait pas de travailler dans ces serres et aurait, à priori, des liens avec une des membres de la famille du Cosquer
Habituellement le conflit social se focalise sur le respect du code du travail et le maintien de l'emploi face au patronat, qui  cherche à maintenir ou améliorer ses privilèges. Ici l'adhésion des salarié(e)s aux méthodes déployées par les employeurs pour réduire à néant toutes revendications sociales, pour s'abroger des règles fixées, est symptomatique d'une population prête à tout pour conserver son emploi, même si ce dernier est stigmatisant pour la condition humaine et donc la leur: pénibilité liée à la chaleur, gestes répétitives (inflammation des articulations), accélération des cadences avec pointeuse (2 T de tomates cueillies/pers/jour), salaire minimum de longue durée, pression psychique sur le personnel, poussée à la concurrence entre salariées, absence de la constitution de groupe d'intérêts sociaux, accentuation des embauches d'étrangers plus corvéables (10 % de la main d’œuvre dans le grand ouest) avec pour conséquence une pression accrue sur le reste du personnel. "Laissez tranquille mon patron", aurait-on pu lire aussi sur les pancartes. Des patrons qui ont bien compris que leur intérêt réside dans la fuite en avant. La course à l'agrandissement des serres est peut-être plus qu'une course à la rentabilité. C'est davantage la nécessité de ne pas disparaître. D'ailleurs, ce phénomène d'agrandissement est connu, pour ceux qui sont en capacité d'investissement, dans d'autres domaines agricoles (cochon, lait,...),  au détriment d'une agriculture paysanne,  de l'environnement, d'une production de qualité et du respect des uns et des autres. 
On dit que la direction de Saveol, la coopérative qui conditionne et commercialise les tomates, est sceptique sur les perspectives de maintien d'une activité de production industrielle, telle qu'on la connait aujourd’hui et qu'elle s'essoufflerait dans une dizaine d'années, face à la concurrence de la tomate marocaine ou espagnole. Signe des temps ? Un serriste, face à l'incertitude des prix sur le marché de la tomate, a fait l'impasse en 2013 sur l'achat de plants, car menacé d'une vente déficitaire.
Si les pronostics de Saveol sont exacts, où seront alors ces employeurs le jour où il faudra prendre en charge et soutenir des personnes jetées à la rue ? Ce sont ceux-là mêmes qui poussent les gens à la confusion et à la colère qui les chasseront sans ménagement en cas de crise. Ce que traversa l'entreprise Gad (abattoir de Lampaul-Guimiliau), ou la société Doux (volaille industrielle) n'est pas réservé à ces seuls secteurs d'activité agro-industrielle en Bretagne. Il y aura de la casse, pour Didier c’était certain, mais une casse sociale. Les serres, elles, resteront figées dans le paysage d'une friche industrielle.
Malgré la tension ambiante, les regards belliqueux, l’absence délibérée de vouloir échanger avec Didier et l’impertinente du manoir, Didier ne se sentait pas dépassé par un tel déferlement de colère, ni même inquiété. Son repli constituait plutôt une volonté d’interrompre une situation de blocage. Avant de partir, il alla bien jusqu’à apostropher la compagne de l’homme aux 10 ha de serres : « Si vous me menacez, si vous essayez de vous en prendre à moi, déjà je porte plainte et puis je fais venir mes copains altermondialistes de Notre Dame ! ». Ca ne coûtait rien de le dire. Ca pouvait la faire réfléchir. Un peu. Peut-être imaginerait-elle voir arriver des gros camions, remplis de punk à chiens. Encore fallait-il qu’elle soit pourvue d’une telle capacité.


samedi 16 novembre 2019

Dépôts de plaintes contre dépôts de déchets

L'association environnementale "A quoi ça serre" a procédé à une nouvelle série de dépôts de plaintes contre X, même si les auteurs de ces méfaits sont identifiés, voire récidiviste pour l'un d'entre eux. Les premiers relevés de l'association datent de 2016. Aucune évolution significative vers moins de dégradation n'a été observée en cette fin d'année, au contraire même. A noter que les deux serristes sont adhérents de Saveol.

D'un côté, au lieu-dit le quillioù, un industriel de la tomate entrepose, exposés aux précipitations, des résidus de combustion issus de la chaudière à bois, des mâchefers. A ce stade il est difficile de définir le niveau de toxicité de ces déchets ultimes. Néanmoins, l’exploitant industriel devrait être muni, à minima, d’une évaluation détaillée afin de déterminer le caractère de dangerosité de ce type de déchets. On reconnaîtra aussi les habituels rounds de plants de tomates et leur rejets. 


Quillioù. Au fond à gauche, les mâchefers. Sur la droite, entrepôts des rounds végétaux et les déchets verts
Mâchefers

Détails des dépôts du quilliou














Autre cas, autre lieu, sur le secteur de roc'h nivellen. L'exploitant, malgré les mises en demeure répétées du policier municipal, reste sourd aux injonctions. La répétition des dépôts amplifie le caractère permanent et irrévocable des pollutions. (lien vidéo ci-dessous).




Plants de tomates en fermentation - Roc'h nivellen
Amoncellement de bagues plastiques - Roc'h nivellen

samedi 9 novembre 2019

Dans "Economie sociale et solidaire" il ne reste plus que l'Economie

Qui se rappelle aujourd'hui que Benoît Hamon, alors Ministre de l'Economie sociale et solidaire (ESS) et de la consommation en 2014 dans le gouvernement d'Emmanuel Valls, était le rédacteur de la loi ESS qui porte son nom  ? Si on s'en tient au flot d'informations qui nous harcèle constamment, et si le secteur de l'ESS est sorti de son anonymat pour être légiféré, je pense que nous ne serons pas nombreux, et au premier chef, tous ceux et celles qui postulent à la représentation locale, à se remémorer que l'ESS, selon la dialectique du gouvernement de l'époque, devait : reconnaître l'ESS comme un mode d'entreprendre spécifique, renforcer les politiques de développement local durable, consolider le réseau de l'ESS, provoquer un choc coopératif, redonner du pouvoir d'agir aux salariés. Nonobstant cette orientation qu'il fallait saluer, il manque, à mes yeux, un 6ème volet qui est de respecter le consommateur, l'usager ou le client selon les institutions.
Pour démonter maintenant le système de l'ESS, je vais me référer à ma propre expérience sur 3 secteurs distincts : la banque, l'assurance et dans une moindre mesure, le fournisseur d'électricité. Je ne considère pas que mon cas de figure doit être généralisé à l'ensemble des personnes qui adhère à l'un ou l'autre de ces secteurs. Toutefois, dans un contexte de fragilité sociale, subie ou pas, par un souscripteur (perte d'emploi, séparation, santé, activité précaire,...), certaines décisions coercitives nous renvoient à de mauvaises habitudes identifiées comme insupportables chez leurs concurrents libéraux ou chez des investisseurs peu scrupuleux sur le devenir de la Planète-Terre.
La banque. Le Crédit coopératif
Fidèle à mes engagements, j'optais au milieu des années 2000, pour un compte NEF (Nouvelle Economie Fraternelle). La Nef, n'ayant pas le statut d'établissement bancaire, était hébergée au Crédit coopératif. Pendant plus de 10 ans, j'alimentais plus ou moins assidûment ce compte. En tout cas, le Crédit coopératif, dans ses fonctions premières de préserver ses intérêts financiers, n'avait pas à signaler de dérapages circonstanciés de ma part.
Tout changea après la faillite de l'entreprise dont j'avais la gestion. Si la Banque de France considéra ma situation qui suivait, non solvable et m'épargnait le remboursement intégral des dettes, je fus dans l'interdiction d'emprunter pendant 10 ans et de profiter de découvert bancaire. Sur ce dernier point, ce ne fut pas vraiment le cas. Le Crédit coopératif, dans sa grande largesse, laissait filer un peu mon débit. Enfin... dans sa grande largesse... à regarder de plus près, mon découvert non autorisé qui en devenait un, leur procurer quelques petits intérêts sous la forme de "frais de compte". Disons que finalement, les deux parties s'y retrouvaient. Jusqu'au jour où, subitement, sans avertissements, la banque quimpéroise décida de "couper les vivres". Débiteur d'un léger découvert de 16 euro, je me présentais chez un commerçant pour l'achat d'une bouteille de gaz d'une valeur de 33 euro. Rassuré par le versement sous 72 H de prestations sociales, je ne me formalisais pas. Sauf que le crédit coopératif vît d'un mauvais œil la présentation du chèque et décida de rejeter le paiement. Là dessus vinrent se rajouter des frais financiers amplifiés par le rejet du prélèvement de la MAIF (sur lequel je reviendrai plus loin), "assurance militante" à laquelle j'avais souscrit pour l'habitation et la voiture, toujours dans un objectif de cohérence. 
Dans un premier temps, gêné de me représenter chez le commerçant pour payer ma dette, je décidais dans ma mauvaise habitude de réagir. J'informais le Crédit coopératif que dorénavant mes prestations sociales seraient versées sur un compte postal que je venais d'ouvrir car je n'admettais pas que la banque fasse une opération financière en sa faveur à partir de prestations sociales obtenues pour assurer le minimum vital. C'était clair dans mon esprit : le Crédit coopératif pendant quelques années se retrouvait hypocritement "hors la loi" et finissait par me punir d'avoir abusé d'un service financier qui ne m'était pas acquis. Soit. Bien-sur, s'en suivirent quelques mois de présentations de frais bancaires pour défaut d'approvisionnement, gonflant au passage le débit de mon compte NEF. Le litige se solda purement et simplement par un échange téléphonique, sévèrement houleux, et la décision unilatérale de la banque de clôturer mon compte, sans à débourser un centime d'euro.
La Maif, L'assureur militant
Une étape était franchie. Je devais maintenant affronter la MAIF qui pendant ce temps ne recevait plus le règlement de mes cotisations alors que, de mon côté, je noyais sous les courriers de réclamations, relances, menaces, etc etc.... Je crois me souvenir que mes arriérés s'élevaient à 150 euro.  Je pris donc le temps de me décider et de solliciter un rendez-vous à l'agence de Brest, afin de trouver une solution d'apurement. Je me présentais donc devant un employé qui examina rapidement mon dossier. Je lui proposais de consentir "un étalonnement de la dette". Après un nouveau regard sur l'écran d'ordinateur, il me répondit que ce n'était pas possible. Soit. Toujours avec cette mauvaise manie de réagir, j'adoptais, néanmoins, cette fois-ci, une attitude plus flegmatique, mais ô combien intériorisée. "Très bien, merci, bonne fin de journée", m'entendait-il lui dire en camouflant secrètement la vraie nature de mes sentiments, "Ah c'est comme ça que tu le prends ! Et bien ta cotisation tu peux attendre pour la récupérer !". Nouvelle série de réclamations, saisie d'une agence de recouvrement, puis d'un Huissier de Justice. Je m'accrochais mordicus à ma fronde silencieuse jusqu'à ce que mon débiteur abdique face au peu de cas que je faisais de leurs menaces. Là aussi je ne déboursais pas un centime d'euro.
Le fournisseur d'électricité : ENERCOOP
Enercoop. La porte de mon appartement
Dès que je pris connaissance, soit dans le courant des années 2000, de l'existence de cette coopérative, créée en 2004 par Greenpeace, le réseau Biocoop, Les amis de la terre,..., regroupant des producteurs indépendants, fournissant une électricité à partir d'énergies renouvelables, je n'hésitais pas un seul instant à devenir sociétaire. D'ailleurs le terme d'usager convenait parfaitement à ma démarche plus global. Je savais que je paierai 25 % de plus qu'une facture émise par EDF; j'ai su qu'Enercoop faillit disparaître à cause d'une équation Offre et Demande difficile à résoudre, je savais que l'électricité que je consommais était d'origine nucléaire, mais la satisfaction reposait sur le fait que je ne versais quasiment plus un centime d'euro à EDF, et qu'il pouvait aller au diable avec leur énergie mortifère. Je resterai fidèle à cet opérateur qui allait dans le bon sens.
Pourtant, me considérant comme un militant historique, un usager des premiers Kwatts de la coopérative, me contentant de régler les factures, si possible dans les délais, je sens quand même qu'Enercoop, tout en consolidant sa gestion en interne, favorisant l'émergence d'antennes régionales, dérive vers plus d'Economie au détriment de la solidarité et du social. Renforcement et âpreté de la concurrence après l'ouverture du marché de l'énergie ? Essoufflement des objectifs de développement ? Toujours est-il que, de notion d"usager" nous sommes passés à celle de "client". Qu'il faut attendre plusieurs dizaine de minutes au téléphone avant de devoir raccrocher, parce que nos relations commerciales sont déshumanisées. Avoir une personne au téléphone puis râler. Enfin, qu'on nous rappelle 5' plus tard afin de régler l'objet de l'appel. Je connais même une personne à qui ils ont coupé l'accès à l'électricité, sans préavis oral, alors qu'elle s'apprêtait à honorer ses factures impayées.
Tous ceux et celles qui ont été acteurs de l'Economie sociale et solidaire, savent la difficulté à rivaliser avec l'économie dite réelle. La difficulté à communiquer sur le volet coopératif. La difficulté à construire dans les pratiques, le concept d'innovation sociale.... La difficulté d'exister harmonieusement sur un territoire afin d'éviter les points de tension. Reste que L'Economie sociale et solidaire n'existerait plus sans les aspects social et solidaire, sinon c'est renier les bases fondamentales du soutien à autrui, et au lieu de renforcer sa précarité, l'accompagner pour soulager son désœuvrement.
David Derrien
Ancien co-président de l'Adess et
Responsable du déploiement de la monnaie complémentaire sur le territoire de Brest