Vous voulez de l'info ? Suivez l'Abeillaud !

Vous voulez de l'info ? Suivez l'Abeillaud !

lundi 12 novembre 2018

L'écologie, le drame du bien commun

"Ce qui est commun au plus grand nombre fait l'objet des soins les moins attentifs. L'homme prend le plus grand soin de ce qui lui est propre, il a tendance à négliger de ce que lui est commun". Aristote

Cours d'eau potentiellement pollué, Plougastel-Daoulas-Ty ar menez, juillet 2017

Le 08 septembre dernier, je publiais sur facebook une vidéo montée par l'association "A quoi ça serre". Elle montrait un dépôt sauvage de gravats issus de chantier de déconstruction, entassé sur le secteur de roc'h nivelen à Plougastel-Daoulas. Cette vidéo fut visionnée plus de 1500 fois. Au même moment, une autre vidéo d'AQCS faisait apparaître l'acte volontaire et illégal d'un serriste récidiviste d'entreposer en plein champ des déchets verts et autres bagues plastiques et ficelles, sensés être récupérés par des entreprises spécialisées. Quelques 180 personnes prirent le temps de la regarder. Rappelons que la dégradation des végétaux industriels en putréfaction provoque des jus fermentescibles, altérant la qualité de l'eau (sels nutritifs), surtout quand les dépôts sont situés, et selon les signalements nombreux et répétés d'AQCS, sur des bassins versants. 

Plus récemment, "A quoi ça serre" dénonça une omerta politico-industrielle sur les pollutions de zones humides engendrées par d'autres serristes de la commune. Encore une fois, l'audience, après la dénonciation de cette pollution des eaux à grande échelle, fut confidentielle. 

Sur un autre sujet, mais non moins essentiel, je fus consterné par le peu de mobilisation lors de l'appel des apiculteurs, toujours en septembre, à les rejoindre sur Carhaix. L'urgence à maintenir une population d'abeilles, pour la plus simple des raisons de pollinisation, est suffisamment relayée par les médias, suffisamment caractérisée par les chercheurs, pour nous inciter à oublier, le temps d'une journée, les loisirs du week-end. 

Dès lors, je me posais la question entêtante de comprendre pourquoi, la désapprobation, voire la mobilisation, en soi légitime pour ceux et celles qui y participent (voir les campagnes de nettoyage des grèves regroupant plusieurs dizaines de personnes), s'avéraient plus intenses et donc plus efficaces, quand il s'agissait de gravats visibles, solides, matériaux familiers à notre quotidien, que sur ce qui pourtant devrait nous intéresser instinctivement au point d'éviter les hypothèses de survivance. 

Nettoyage des abords de l'étang du caro par A quoi ça serre. Plougastel-Daoulas, décembre 2015

Oui, parce que, quand on y pense bien, il suffirait d'une demi-journée pour les services des collectivités, avec peu de moyens, pour déblayer le dernier dépôt (voir photo ci-dessous) découvert lors d'une promenade dominicale. Ce lieu naturel retrouverait son état d'origine sans que cela vienne perturber les prochains promeneurs et effacerait l'émoi sincère mais néanmoins compulsif qu'engendre sa publication. Aux autorités, ensuite, de dissuader les contrevenants à revenir. Mais, à contrario, combien de temps faut-il à une zone côtière pour se retrouver dépourvue d'algues vertes ? Combien de temps faut-il à une zone humide pour épurer son écosystème d'éléments toxiques ? Combien de temps faut-il à un apiculteur pour reconstituer un rucher ? Recomposer des réserves de miel ? Combien de temps reste-il pour voir encore des abeilles sauvages butiner les pommiers et les fleurs sauvages ? 

dépôt de gravats. Plougatel-Daoulas, novembre 2018
L'eau, comme les abeilles (je pourrais m'étendre sur l'ensemble de la biodiversité), deux exemples que j'appréhende dans leur fonction primitive liée à des ressources naturelles et donc intrinsèquement imbriquées à nos vies, sans que je reprenne les caractéristiques de leurs bienfaits sur notre santé et sur notre alimentation, sont indispensables aux biens communs. Mais qu'il y a t-il de "biens communs" dans un tas de gravats déposé dans un bois ? Après tout, cette porte défoncée ou cet évier ébréché, objets attachés à un seul propriétaire, n'interfèrent pas sur ma santé ou sur mon alimentation, je ne dépends pas de leur propre existence, comme pourrait l'être une eau polluée ou comme pourrait l'être la pénurie de légumes et de fruits, utiles au bon fonctionnement de mon organisme. La neutralité chaotique de ces objets, si elle trouve un remède dans une certaine réactivité des moyens de la collectivité, ne supposera pas non plus une dégradation du milieu.

On reconnaîtra (presque) tous que cela reste un acte d'incivilité, perpétré par un individu ou un groupe de personnes, très certainement peu concerné par le bien commun. Serait-ce donc à moi de remédier à ce geste alors que cette porte ou cet évier ne m'appartiennent pas ? Ces objets ne sont pas liés à ma propre existence et encore moins à ma préoccupation de voir rénover le logement individuel d'une tierce personne; ils jouent un rôle de fonctionnalité et non de nécessité. Dès lors je m'affranchis émotionnellement de cette dépossession car je fige ma priorité sur le maintien du Vivant.

Qu'il soit bien entendu que je ne fais que retranscrire mes observations à partir de réseaux sociaux, sans jugement de valeurs, car je suppose que la plupart des gens qui réagissent sont bienveillants. Mais je remarque quand même que l'attention est nettement moins soutenue sur les sujets liés à la qualité de l'eau ou la disparition de l'abeille sauvage. 

Nous assistons à l'extinction du patrimoine naturel immatériel. Nous ne sommes pas étrangers à ce phénomène, tout en étant dramatiquement et consciemment concernés.

samedi 10 novembre 2018

Y a de quoi ce marais ! Trizek

Scribes d'humeur partiellement publiés dans la revue d'Eau et Rivières de Bretagne, octobre 2018. Dessin de nono


Mme Lamour, mairesse de Ploudalmezeau (29)


Fatigué
Parce qu’elle souffre d’hypersensibilité électrique, une quévenoise s’est vu retirer son compteur linky. « Je suis tout le temps fatiguée », précise-t-elle. (Ouest-France, 14/07/18). « Il faut le mettre, sinon on vous coupe le courant », avait menacé un technicien. Le maire de la commune, quant à lui, ajoute que « Nous, on fera ce qu’on peut pour cette dame mais je suis fatigué de ce débat ridicule ». Marc Boutruche devrait vérifier si le compteur linky de son domicile n’est pas à l’origine de cette fatigue.


Rejet
A partir de janvier 2019, les pêcheurs auront pour obligation de garder à bord les espèces non ciblées (Ouest-France, 18/07/18). Pour le président du comité finistérien cette mesure n’a pas de sens, apportant son lot de contraintes liées au temps en sus de tri et de manutention. Cette pêche débarquée et non utilisée reviendrait « à travailler pour rien ». Des pêcheurs qui rejettent la mesure de rejets, n’en jetez plus !

Un peu vache !
La confédération paysanne du Finistère a porté plainte pour « extorsions » contre les laiteries du département (Le Télégramme, 19/07/18). Le représentant du syndicat remet en cause le principe des contrats qu’il estime être fait sous la contrainte. « On veut que soit reconnue l’entente entre les laiteries et que soit reconnue l’illégalité de ces pratiques ». C’est quand même un peu vache de procéder ainsi.

Eun Tam bio ?
A Brest la commercialisation de produits à base de spiruline a le vent en poupe. Pour preuve, une boisson énergisante a vu le jour, la « Spiloe » (Le Télégramme, 28/07/18). Le concepteur a décidé de commencer par utiliser de la spiruline « car la ressource est à porter de main ». L’article précise en effet qu’elle provient d’une ferme bio de Plougastel-Daoulas. Qualifier des serres industrielles ainsi, donne un sérieux coup de mou.

Matière grise
Des usagers s’insurgent contre le bitumage du cheminement doux à Landunvez (Ouest-France, 26/07/18). La communauté de communes avait pourtant annoncé que le chemin serait « stabilisé, empierré et sablé ». Interrogé, André Talarmin, président de la collectivité, précise que le goudron ne sera pas retiré et qu’un revêtement en sable a été prévu par-dessus. Ingénieuse idée, connaissant les conditions climatiques de la Bretagne. A défaut de trame verte, il y a de la matière grise.

Mégot, c’est trop !
Comme le regrette Ségolène Gueguen, chargée de mission à Natura 2000 dans la presqu’île de Crozon, beaucoup trop de mégots sont jetés dans les dunes (Le Télégramme, 28/07/18). A chaque passage mensuel, ce sont plusieurs dizaines de mégots qui sont ramassés. Elle rappelle qu’il existe des cendriers de poche comme solution. Si seulement le groupe « Téléphone » était toujours en formation, il aurait pu chanter « mégot, c’est trop ». Oui, c’est beaucoup trop.

Avec les zoneurs
Une méga ferme de production de micro-algues est en cours de construction sur 32 ha à Plouguenast (AFP, 01/08/18). La Bretagne est idéale pour son implantation à cause de sa ressource en lisier. Mais le projet a pris du retard notamment parce qu’ERB affirme que la ferme sera construite sur 12 ha de zones humides alors que l’industriel en comptabilisait 1,2 ha. Le terrassement ayant débuté, une troisième étude n’a pas été possible. Saluons ce comportement avec les zoneurs qu’il se doit.

Rien que Lamour
A Ploudalmezeau, la plage de Treompan a été fermée à la baignade durant tout l’été (Le Télégramme, 18/08/18). Une analyse du Frout, rivière qui se jette dans la mer, a décelé des bactéries d’origine animale et humaine. Eau et rivières de Bretagne préconise des contrôles sur tout le bassin versant. La mairesse, Marguerite Lamour, s’insurge contre un tel positionnement : « Vouloir faire peur à la population est incorrecte ». A Ploudalmezeau il y a de l’amour, rien que Lamour.

Laisse béton
Les côtes bretonnes n’échappent pas à l’action de la montée des eaux. « La majorité des côtes subit une érosion sérieuse », confirme un expert en risques hydrauliques (18/08/18). A Trégastel, d’importants travaux d’aménagements ont été réalisés pour préserver les maisons de sept riverains pour un coût de 250 000 euro, justifié par la mairie. Une telle mesure pour une poignée de privilégiés ? Laisse béton !

Au revoir
Pour exprimer leur colère face à la chute des cours de la tomate et à une distorsion de concurrence, des producteurs industriels ont organisé en août un barrage filtrant et une distribution de tomates au niveau de Saint-Brieuc (24/08/18). L’opération visait à « toucher les parisiens qui rentrent chez eux après les vacances pour leur faire penser à manger français durant l’hiver » assure le président de la Fdsea 22. Avec un tel produit, on n’est pas sur de les revoir.

Lever un lièvre
Triskalia a tenté de dissimuler à un éleveur bovin de Moustéru qu’elle lui avait fourni de l’aliment contenant des antibiotiques, non autorisés chez les ruminants (Médiapart, 29/08/18).  Selon un technicien, l’éleveur aurait reçu par erreur, un aliment pour les lapins, dépourvu d’antibiotiques d’après un cadre de la coopérative. Or, l’éleveur décide d’analyser un échantillon qui révèle la présence de six antibiotiques, au lieu de deux comme indiqué sur l’étiquette. Pour les adhérents de Triskalia, lever un lièvre doit devenir une seconde nature.

Perlimpinpin
Chez Synutra, la vente de poudre de lait infantile en direction de la Chine a été très en-deçà des prévisions de départ (agrobiosciences, 14/09/18). Résultat : les impayés, évalués à 30 millions d’euro auprès des producteurs de Sodiaal, s’accumulent au point d’obliger la coopérative laitière à racheter une partie de l’usine de Carhaix. Avec cette énième déconvenue, Synutra n’aura été d’aucuns bénéfices pour le centre Finistère.