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samedi 5 juillet 2014

Le Viêt Nam et l'aRgent orange de Monsanto

On l'ignore encore aujourd'hui mais la guerre du Viêt Nam reste la plus grande guerre chimique de l'histoire qu'ait connu l'Humanité. Plus de 100 millions de litres de défoliants, dont le fameux agent orange de Monsanto, ont été déversés sur le pays. Résultat : 10 % du territoire vietnamien est gorgé de dioxine (composant de l'agent orange) avec une rémanence de 10 à 20 ans selon les sols.
Cette réalité écocidaire pourrait se limiter à une période historique, comprise entre 1961 et 1971, période d'épandage de l'agent orange par l'aviation américaine sur les forêts. Mais comme les famines volontaires ou les mines antipersonnelles, abandonnées et disséminées sur des théâtres de conflits, les effets d'un des herbicides les plus néfastes continuent de faire des ravages sur les populations locales et notamment sur les nouveaux-nés, bien après la fin de l'opération appelée cyniquement "Hadès" (Dieu des morts).
Au début de ce siècle les estimations les plus frappantes dénombrent que quasiment 5 millions de personnes ont été concernées par les effets directs de l'agent orange (combattants viêt congs, américains et civils), sans préciser toutefois le nombre inconnu de Cambodgiens, de Laotiens et de militaires des autres nationalités. Mais le total des victimes va au-delà, car le phénomène de contamination par la dioxine s'amplifie par la chaîne alimentaire. 
La dioxine n'est certainement pas un problème du passé pour les familles; l'empoisonnement se transmet depuis 35 ans et concerne la seconde et troisième génération des nouveaux-nés. Les manifestations les plus insoutenables de l'action de la dioxine sur l'organisme humain sont caractérisées par des malformations congénitales qui se développeront avec la croissance de l'enfant ou par des handicaps lourds (absence ou déformation de membres) mais une liste dressée notamment par l'Institut de Médecine fait état de 33 maladies provoquées par l'agent orange, dont seulement 4 d'entre-elles "offrent une preuve suffisante d'un rapport avec l'exposition aux herbicides".
Pourtant, le statut de victime des conséquences de l'action de la dioxine sur la santé n'est pas jugé de la même manière que l'on soit américain ou vietnamien. En effet, pour éviter d'embarrasser le gouvernement américain, les principaux fabricants de produits chimiques, avec à leur tête Dow chemical et Monsanto, ont accepté de signer en 1984 un accord à l'amiable avec les associations de vétérans en échange de l'arrêt de toute poursuite judiciaire, reconnaissant implicitement leur responsabilité, conjointe à celle de l'Etat américain, sur le rôle joué par les herbicides dans l'aggravation de la santé des anciens combattants américains. Si on sait que ces industriels ont versé 180 Millions de dollars à ces associations, que représente cette somme par rapport aux millions empochés par les contrats juteux signés entre les firmes et l'armée américaine ? Ce n'est certainement pas de l'argent jeté par les fenêtres...des carlingues, et pas perdu pour tout le monde cet argent orange ! Par contre, en cas de condamnation pour reconnaître les mêmes faits au Viêt Nam, c'est plusieurs centaines de milliards de dollars qu'il faudrait lever pour dédommager les familles et réparer les dégâts environnementaux. En 2004 l'association vietnamienne de l'Agent orange a porté plainte contre les fabricants. Fin 2009, la cour suprême des Etats-Unis a rejeté leur requête.
Quelles que soient les époques, les continents, les régimes, les raisons religieuses et belliqueuses, les principales victimes des conflits armés restent les civils (à l'exception peut-être de la première guerre mondiale, mais un ouvrier ou un paysan mobilisé pour endosser l'uniforme et protéger les intérêts des princes et des généraux, n'est-il pas avant tout un civil ?). Ces confrontations sanguinaires et épisodiques prennent plus ou moins fin avec la victoire d'une armée sur l'autre. Toutes hostilités cessantes, les gouvernants prennent possession et gouvernent, les populations enterrent leur mort, reconstruisent leur village et retournent au champ, vaquer à leur précaire existence, ne se souvenant, de temps à autre, du passé que parce que l'un des membres de la famille a justement perdu l'un des ses membres. En l’occurrence, ce scénario ne convient pas aux populations vietnamiennes. "Si un jour existe une unité capable de mesurer la douleur et la souffrance, elle devra s'appeler Viêt Nam" proclame André Bouny, auteur du livre-documentaire "Agent orange - Apocalyspe Viêt nam". Il n'est pas exagéré de dire cela, mais au-delà de l'abominable réalité des corps affligés, qu'il est nécessaire de rendre visible : "Cela est presque insupportable, mais se détourner et ne pas regarder les photographies, c'est aggraver le crime" comme le soulignait la journaliste de guerre Gloria Emerson, il faut penser aux familles et notamment aux femmes, qui se retrouvent dans le plus grand dénuement. 
L’apocalypse elles le bravent tous les jours en affrontant les convulsions de leur infortunée progéniture. Il doit être effroyable d'être confrontées à des situations de détresse ultime. Chaque jour qui passe. Chaque nuit qui passe. Tout en acceptant les causes lointaines d'un ravage écologique il faut en plus en assumant les conséquences dégénératives suite à leur souhait naturel d'enfanter. Ce n'est pas une nouvelle vie qui est martyrisée mais bien l'ensemble de la cellule familiale. Ajoutée aux croyances locales qui obligent à concevoir un être capable de prendre la succession parentale, c'est parfois 4, 5, ou 6 membres d'une même famille qui viennent se rajouter aux fardeaux des mères sans que grâce soit faite. Ultime cruauté que de ne pas assouvir les préceptes communautaires. 
L'Etat vietnamien, tout communiste qu'il soit, voire totalitaire, semble s'accommoder de la réalité économique du capitalisme en réalisant des affaires avec les Etats-Unis. L'époque est à la réconciliation et au repenti. Pour preuve, Les Etats-Unis ont déjà décontaminé 2 ha de terres de l'agent orange. 2 ha qui ont coûté des millions de dollars. Combien pour traiter les 1.68 millions d'ha contaminés ? D'ailleurs, signe des temps, Monsanto est revenu au Viêt Nam. Le pays étant le second producteur de riz au monde, cette position lucrative demande des moyens conséquents et les pesticides utilisés de façon intensive en est un. En parallèle, ce qui s'apparente à une pandémie chimique, avec des conséquences sanitaires majeures, ne semble pas être une priorité nationale pour les dirigeants, en terme d'investissement dans la recherche scientifique, l'accompagnement médicalisé, la construction de centres adaptés, de la formation de personnel qualifié, dans le soutien aux familles,...D'après certaines sources économiques
américaines, le Viêt Nam présente un fort potentiel de développement, les investisseurs américains ont le champ libre et Monsanto a de beaux jours devant lui, face au peu de contestation qui jadis a fait abdiquer la première puissance militaire.
L'impuissance et l'injustice se confondent bien dans ces contrées reculées. Les cris et les pleurs viennent heurter de plein fouet le barrage d'une végétation abondante, étouffant ainsi de mornes existences. Qui veut l'entendre ? Ou du moins qui veut les voir ? Ma vérité serait asséchée si je n'avais pas une pensée pour toutes ces femmes qui ne feront pas le deuil d'une guerre inachevée, emprisonnées qu'elles sont dans un écrin de douleurs.
Avec la complicité d'Adrien, militant de la biocoop de Landerneau, nous avons accueilli André Bouny pour la projection du film "Agent orange, une bombe à retardement". Il était venu aussi annoncer l'ouverture d'un procès unique contre les firmes pétrochimiques, car mené par une française d'origine vietnamienne, Tran To Nga, probablement intoxiquée par l'agent orange. Une dizaine de personnes s'est déplacée pour cette soirée. Sans avoir à être déçu du peu d'audience autour du sujet, cette simple déficience nécessite de l'engagement et qu'il se poursuive. Ce sera celui de dédé l'Abeillaud courant juillet, courant sur les marchés du Finistère pour dévoiler l'insoutenable vérité. "Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire" disait Jean Jaurès et tant qu'à faire trouver la sienne.

2 commentaires:

  1. Salut David, c'est bien de ressortir cette affaire. Nous (extrême-gauche) l'avons dénoncé il y a 45 ans déjà, lorsque le Viet-nam était sous les bombardements des "défoliants" américains.

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  2. Merci David de nous rappeler cette tragédie qui continue de faire des victimes près de 50 ans plus tard. Bravo à André Bouny pour la qualité de son travail. Au Vietnam, aujourd'hui, la nature tente difficilement de reprendre le dessus. Mais déjà d'autres dangers la menacent comme la montée du niveau de la mer, l'agriculture intensive, l'urbanisation sauvage. Bientôt, le pays sera doté de 2 centrales nucléaires pour faire face à la demande énergétique qu'exige la croissance économique...

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