Fidèle à son histoire, l'Etat français a décidé de "baisser pavillon" devant le refus des britanniques d'octroyer des licences supplémentaires à des pêcheurs bretons, pourtant négociées lors des accords du Brexit.
Pendant que les économistes nous ressassent que la pêche ne représente que 1 % du PIB européen, et qu'au fond il ne faudrait pas cristalliser les tensions sur ce seul désaccord, au risque de plomber d'autres volets des négociations, que la France après avoir bondé le torse, en menaçant les anglais de rétorsions économiques, se dérobe en proposant d'indemniser les navires bretons "bon pour la casse", c'est encore un secteur d'activité emblématique de la Bretagne que l'on sacrifie, tout autant l'Histoire qui lui est consacré, après bien des turbulences retentissantes du soulèvement de 1994, ou que l'on méprise comme l'a fait Nicolas Sarkozy lors d'une visite au Guilvinec en 2007.
Cimetière de bateaux à Camaret |
Les anglais, et à sa tête Boris Johnson, parviennent une nouvelle fois à obtenir gain de cause par un joli bras d'honneur adressé non seulement à la commission européenne mais aux Bretons eux-mêmes. Car ce n'est pas les seuls pêcheurs qui sont concernés, c'est toute la population bretonne, généralement si fière de ses pêcheurs, qui devrait se sentir en colère. En colère non seulement contre les anglais, peu scrupuleux, mais aussi contre les français, qui à l'image de ce qu'elle a fait subir à l'industrie, se désolidarise des pêcheurs que l'on mène vers une issue irréversible. Le président du conseil régional, Loig Chesnais-Girard l'a bien compris. Il prétendait d'ailleurs faire mieux que la ministre de la mer, Annick Girardin, en annonçant que "la Bretagne montre ses muscles". Le 01 octobre il déclarait : "Je veux que dans les 10 jours il y ait une réunion des trois régions (Bretagne, Normandie, Hauts-de-France), du gouvernement, de l'Union européenne face au Royaume-Uni et à Jersey pour définir et appliquer les règles." Il faut croire que seuls les goélands l'ont entendu à voir l'issue du rapport de force franco-anglais 1 mois plus tard; les navires jersiais pourront continuer à débarquer leur pêche dans les ports bretons sans être pénalisés. Les seuls qui le seront, sont ceux à qui l'on propose de détruire leur outil de travail, équipé certainement des dernières installations technologiques et obtenir en contrepartie une compensation financière qui démarrerait à 40 millions d'euro.
Non seulement c'est un fiasco comme le tonnent les pêcheurs de St-Malo, mais c'est surtout une nouvelle aberration financière : détruire un outil de travail performant financé par de jeunes entrepreneurs pour qu'il soit compensé par la dette via l'Europe.... Entendons-nous les économistes libéraux sur ce point ? Eux qui soutiennent que les écologistes sont contre la technologie ? Non, il existe des écologistes bretons qui se nourrissent à partir des produits de la mer et qui par leur acte d'achat soutiennent la filière toute entière tant qu'elle s'adapte à ses obligations de respect des ressources et des méthodes artisanales de pêche, en se dotant de moyens technologiques pour y parvenir s'il le faut.
"La France a baissé son froc" a affirmé le président du comité des pêches des Côtes d'Armor, Alain Coudray. Certes. Mais si les Bretons doivent montrer les dents contre les britanniques, ce n'est pas en regardant vers Paris que les pêcheurs se feront respecter par leurs homologues anglais. Quant au président de la région Bretagne, il ne peut que se cacher derrière de l'affichage public car il sait l'impuissance d'un nain provincial dans le giron de la république française. S'il a en partie la main sur les ports bretons, il n'a pas la poigne, et pas grand chose dans le pantalon, pour s'opposer au revers des Anglais et à l'autorité de l'Etat. Il aurait peut-être déjà pu annoncer un boycott sur les produits de la mer en provenance de l'Angleterre félonne ? Si la France est fidèle à son histoire, la Bretagne aussi, coincée entre deux puissances qui la malmènent.
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